Marie François Joseph de MIRIBEL, né le 14/9/1831 à Montbonnot (Isère)
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Elève de Polytechnique en 1851, il est nommé sous lieutenant en 1853 et va compléter sa formation à l'école d'application de Metz. Sorti le 14/4/1855, il part en Crimée en mai 1855 à la disposition du général commandant l'artillerie de l'armée d'Orient.
Lieutenant le 1/10/1855, il sert dans une batterie aux attaques de gauche. De retour en France en juin 1856, il passe au régiment d'artillerie à cheval de la Garde. Durant la campagne d'Italie, il sert à la 5e batterie. Il se bat à Magenta où il reçoit la Légion d'Honneur, puis à Solférino où il est blessé et a les deux mains traversées par une balle. Il est nommé chevalier de l'ordre militaire de Savoie.
Capitaine le 31/12/1859, il sert au 18em régiment d'artillerie à cheval. Le 17/7/1862, il est affecté à l'état major du corps expéditionaire du Mexique. Au siège de Puebla, il commande le détachement des encloueurs qui prend la tête de la colonne d'assaut lors de la prise du fort de San Xavier le 29/3/1863; il est blessé à la tête et prommu officier de la Légion d'Honneur.
Il reste au Mexique jusqu'à la prise d'Oxaca, puis rentre en France comme officier d'ordonnance du Maréchal Randon (avril 65). Il est alors nommé Chef d'escadron le 19/1/1867. Attaché à l'EM d'artillerie du Corps de Ladmirault. En octobre 1868, il représente la France à StPetersbourg et devient attaché militaire en Russie.
Guerre contre l'Allemagne. Rappelé en France, il est chargé de commander l'artillerie de la division du Gl de Maussion (3e DI). Il entre en fonction et prend part dès son arrivée aux combats de Chatillon et de la Malmaison, lors du siège de Paris.
Nommé Lieutenant Colonel , il est sous chef d'état major de l'artillerie de la 2e armée de Paris, puis le 23/11/1870 il est mis à la tête de la 2em brigade d'infanterie de la division Berthaut et combat à Villiers puis à Champigny.
Promu Colonel le 14/12/1870, il conserve le commandement de sa brigade au Bourget et à Buzenval où il se distingue "Officier supérieur du plus grand mérite. Il réunit toutes les qualités qui font un chef remarquable, l'instruction, l'énergie, l'entrain et une rare intelligence de la guerre. Toujours le premier au feu, où il déploie la plus brillante bravoure, il a su imprimer la confiance la plus absolue à ses régiments de garde mobile et obtenir de cette jeune troupe des actes de vigueur remarquables." Après la capituilation, il commande l'artillerie du corps de Cherbourg en 1871, il revient à Paris contre la Commune. Il est chargé de la direction de l'artillerie de la gauche des attaques du 2e Corps d'armée (attaques du Point du Jour et de Montrouge). Après la guerre il commande le 8em RA, puis l'artillerie du 6em CA (1875).
Général de brigade le 3/5/1875, à la tête de la 31em brigade. En 1877, il est chef de mission chargé de suivre les manoeuvres allemandes, puis est nommé à la tête de l'Etat major du ministre de la guerre (28/11/1878). En janvier 1879, le nouveau ministre Gresley l'envoie commander l'artillerie du 5em CA.
Général de division 24/7/1880. Il commande la 28 DI, puis est une nouvelle fois nommé CEMA par le général Campenon. Il exerce ce commandement jusqu'à la chute du ministere Gambetta. Membre du Comité d'artillerie (1882-1888), il préside la mission qui suit les manoeuvres de l'armée Russe en 1884. Commandeur de la LH en 1884. Membre du Comité d'EM (1886), puis du CSG (1886-1890). Il commande le 6em CA en 1889 et 1890. GO LH 1889. Freycinet, après sa réorganisation de l'état major en 1890, le nomme chef de l'Etat Major réorganisé, ce qui fait de lui le second personnage le plus important de la hiérarchie militaire. Il décède en fonction en 1893.
Notice du livre centenaire de l'école Polytechnique :
Marie-François-Joseph de Miribel est le fils de Anne-César-Loup-Arthur de
Miribel et de Marie-Thérèse-Joséphine-Adrienne-Alexandrine de Valory, né le 14
septembre 1831 à Montbonnot (Isère); marié, le 7 avril 1867, à mademoiselle de
Grouchy; décédé au château de Chastelard (Drôme), le 12 septembre 1893.
Simplicité, génie, vaillance, ces trois mots résument la carrière et la vie du
Chef d'Etat-Major général de l'armée, dont la France a si cruellement ressenti
la perte.
C'est au château de Montbonnot, antique demeure de sa famille,
dans la vallée du Grésivaudan et à quelques beurcs seulement de la capitale du
Dauphiné, que naissait en 1831 le général de Miribel. Il était donc du pays de
Bayard et de Lesdiguières et il s'en honorait. Les traditions de courage et de
vertu qui sont le patrimoine sacré de cette terre de soldats, étaient une
préface naturelle à la vie toute d'honneur, de patriotisme et de dévouement de
celui qui fut la gloire de nos champs de bataille et l'organisateur de nos
forces militaires.
Admis à l'Ecole Polytechnique en 1851, le sous-lieutenant
de Miribel entrait, le 14 avril 1855, au 17e régiment d'artillerie à cheval.
Mais déjà le canon de l'Alma et d'Inkermann avait fait battre bien des
poitrines, et nul ne pouvait ressentir plus vivement que le nouveau
sous-lieutenant l'entraînement du danger et de la gloire, le désir de donner à
sa patrie toutes ses énergies, tout son sang. Il s'embarquait en effet le 9 juin
de celle même année et courait faire ses premières armes dans le corps de
l'Artillerie pour lequel, durant toute sa vie, il eut un véritable
amour. Dans cette lutte vraiment antique, où les armées de deux grands pays
ont étonné le monde par leur bravoure et leur loyauté, où chacun des deux
adversaires a su emporter l'estime et l'admiration de l'autre, où tant de sang
répandu n'a fait que cimenter pour l'avenir une amitié à laquelle le jeune
officier, devenu Chef d'État-Major général de l'Armée, devait contribuer pour
une si grande part, les héros ne manquaient pas. Le sous-lieutenant de Miribel
sut prendre, malgré sa jeunesse, une des premières places parmi ces
vaillants. Il servait, aux attaques de gauche, dans une batterie de siège
violemment canonnée par les Russes. Ses hommes s'impressionnaient; les pertes
étaient sensibles. Cet instant terrible que seuls reconnaissent les vrais
guerriers, instant où il faut qu'à tout prix le chef relève les cœurs pour
éviter une catastrophe, était arrivé. Le jeune officier a fait son sacrifice :
sans hésitation, avec ce calme et cette bonne humeur qui furent toujours la
caractéristique de ses qualités militaires et privées, il monte seul sur
l'épaulement, les balles pleuvent autour de lui et les hourras de ses soldats
lui montrent qu'il a su, d'un coup, conquérir leur admiration.
La place du
brillant soldat, au retour de la guerre d'Orient, était marquée dans un corps
d'élite : le lieutenant de Miribel entrait, en 1856, dans le régiment
d'artillerie à cheval de la garde. Mais la période des campagnes était
ouverte, et allait permettre au jeune officier de déployer les trésors d'ardeur
et d'énergie, qui sont l'apanage des âmes comme la sienne. La croix
récompensait, le 17 juin 1859, la belle conduite du lieutenant de Miribel à
Magenta; il avait à peine 28 ans. Quelques jours après, sur le champ de bataille
de Solférino, pointant lui-même une de ses pièces, il avait les deux mains
traversées par une balle. Le 31 décembre suivant, il était promu
capitaine.
Trois années se sont écoulées, et la campagne du Mexique
entraînait sur cette terre lointaine toute une élite de jeunes officiers, dont
les noms allaient devenir les premiers de notre armée. Le capitaine de Miribel
allait briller au premier rang et accomplir un fait d'armes, que les galeries de
Versailles conservent à la postérité. C'était à Puebla, citadelle sur laquelle
les Mexicains avaient accumulé leurs meilleures défenses. L'Artillerie française
avait accompli son œuvre et on se décidait à l'assaut. Il fallait s'assurer tout
d'abord que la brèche était suffisante. Qui charger d'une mission aussi
périlleuse et aussi délicate? Le capitaine de Miribel venait en revendiquer
l'honneur et, le 28 mars 1863, à la faveur de la nuit, il se glissait seul à
travers les hautes herbes, rampant pour ne pas être aperçu, et parvenait ainsi
jusqu'aux murailles de la place. Mais l'ennemi veillait, et une grèle de balles
venait s'abattre autour de lui : « A ce moment, racontait depuis le général de
Miribel, j'ai revu toute ma vie comme dans un éclair, car je pensais bien que
c'en était fait de moi ». Cette existence déjà glorieuse, le jeune capitaine la
sacrifiait à sa patrie et, toujours calme et souriant, il se sentait prêt à
comparaître devant le Dieu des armées. La mort ne voulut pas de lui; il rapporta
dans nos cantonnements les précieux résultats de sa reconnaissance, et ne
demanda, pour récompense, que le dangereux honneur de commander, à l'assaut, le
détachement des encloueurs. Le 29 mars 1863, nos troupes s'ébranlent pour
l'attaque. En tête de la première colonne marche le capitaine de Miribel avec sa
poignée de braves. Arrivé auprès des remparts, il est frappé d'une balle à la
tête, mais la blessure est légère et ne ralentit pas son mouvement; il se jette
au pas de course sur les canons des Mexicains. Cette brillante conduite lui
valut une citation à l'ordre de l'armée et la croix d'Officier de la Légion
d'honneur.
L'attention des chefs de l'armée avait été attirée sur ce jeune
officier, dont les qualités d'initiative et de vigueur se prodiguaient sur tous
les champs de bataille. Le maréchal Randon, Ministre de la Guerre, se
l'attachait le 15 mai 1865, en qualité d'aide de camp. Le maréchal Randon ne
voulait autour de lui que des officiers d'élite et il ne manquait jamais de les
mettre, dès l'abord, à l'épreuve. C'est ainsi qu'à son arrivée le capitaine de
Miribel fut chargé d'un travail sur la mobilisation de nos forces, dans l'idée
d'un conflit que la question du Luxembourg pouvait à tout instant faire naître.
Pour un capitaine de 34 ans, qui, depuis le début de sa carrière, avait été
constamment en campagne, l'œuvre pouvait paraître lourde. Mais déjà l'esprit
était mûr, et les grandes qualités d'organisateur, qu'il devait faire briller
plus tard dans les hautes fonctions de l'armée, allaient jeter un premier éclat.
Le projet fut approuvé, et, le 9 janvier 1867, le grade de chef d'escadron
assurait à de Miribel une carrière que, pour le bien de l'armée, il fallait
pousser le plus rapidement possible. Il venait de donner la mesure de ce qu'il
devait être, le jour où lui serait confiée la réorganisation de nos forces
militaires.
Le 27 octobre 1868, le commandant de Miribel était nommé attaché
militaire à l'Ambassade de Saint-Pétersbourg. Grâce à ses hautes facultés, grâce
au charme de son esprit et à la distinction de ses manières, soutenu par
l'admirable compagne qui fut son plus ferme appui dans les bons comme dans les
mauvais jours, il sut conquérir auprès des princes et de la haute société russe
cette situation toute personnelle, si utile quand il faut faire prévaloir
l'influence de son pays.
L'année terrible approchait. Le commandant de
Miribel suivait d'un oeil inquiet et attentif la marche des événements, ne
laissant rien échapper, renseignant son gouvernement et se servant de son
influence considérable dans la capitale russe, pour nous procurer des amis, ou
du moins des neutres bienveillants. La guerre éclatait enfin, et, si rien ne put
être évité à ce moment, la Russie dut se souvenir, quelques années plus tard,
des protestations fermes et respectueuses qu'avait fait entendre le représentant
militaire de la France. Le 29 août 1870, il obtenait le commandement de
l'artillerie de la 3e division du 14e corps, à Paris. Il se couvrait de gloire
au combat de la Malmaison. Se porter crânement en avant jusqu'au milieu des
tirailleurs, afin de mieux découvrir la position ennemie, briser l'élan des
colonnes prussiennes, lutter jusqu'à la dernière minute à coups de mitraille,
quand il faut céder devant le nombre, telle est la belle conduite de ceux que le
général Ducrot appela « ces vaillants ». Leur chef fut cité à l'ordre de l'armée
« pour son audace poussée jusqu'à la témérité ». Le 3 novembre 1870, de
Miribel était nommé lieutenant-colonel, et le général Ducrot, qui savait choisir
ses auxiliaires, attacha à son Etat-major l'officier intrépide qu'il avait
remarqué sur le champ de bataille. Dans les conseils où, depuis ce moment, il
est constamment appelé, ses vues sont simples et précises comme la lumière.
Faut-il agir? Ses décisions sont d'une sûreté qui n'abandonne rien aux fausses
manœuvres, et d'une promptitude qui défie tout retard. Le 23 novembre
1870, il reçoit le grade de colonel et le commandement d'une brigade de mobiles,
dont il fait, en quelques jours, une troupe solide et exemplaire, qui sut
acquérir, dans la main de son chef à Champigny, puis au Bourgel et enfin à
Buzenval, la plus glorieuse renommée. Rien n'égalait l'admiration de ces soldats
improvisés pour leur jeune et déjà illustre chef. Sa vaillance les frappait
d'autant plus qu'elle était calme et simple comme toutes ses actions; ses hommes
étaient ses enfants, et son exemple, comme sa bonté, avait su les électriser.
Aucun officier ne fut plus utile à la défense de Paris que le colonel de
Miribel; la France fut vaincue, mais il apparut, au milieu de cette défaite,
comme l'une des meilleures espérances de la Patrie.
Le 29 février 1872, de
Miribel prenait le commandement du 8e régiment d'artillerie, et, le 28 avril
1874, il amenait son régiment à Chalons. C'est dans ce 6e corps qu'il étudia la
frontière de l'Est, et il n'y eut pas une montagne, pas une colline, pas un
cours d'eau qu'il ne connut bientôt aussi complètement que les Alpes, auprès
desquelles il était né. Il était dès lors préparé aux plus hautes fonctions
militaires; il avait le coup d'oeil du chef. Les grandes lignes d'une œuvre lui
apparaissaient soudain comme par intuition, et, en même temps, il découvrait, il
devinait avec une rapidité étonnante tous les plus petits détails. Nommé général
par décret du 3 mai 1875, de Miribel reçut le commandement de la 31e brigade
d'infanterie, au camp d'Avor et à Bourges. Il n'était pas d'usage alors de
prendre un officier général pour lui donner un commandement dans une arme autre
que la sienne; mais le général Ducrot savait bien en quelles mains il remettait
cette brigade, et là, comme plus tard dans ses voyages d'état-major et dans ses
inspections, le jeune général provoquait l'admiration et l'enthousiasme de ses
subordonnés. En novembre 1877, de Miribel était nommé chef d'État-major du
Ministre de la Guerre. Il entreprenait alors ces immenses travaux de la
mobilisation et de la préparation à la guerre qui lui ont mérité la
reconnaissance du pays. Depuis ce moment, l'Etat-major général a tenu toujours à
suivre les directives qui avaient été tracées par le créateur de l'œuvre. Il
était, en 1879, relevé de ses fonctions et nommé au commandement de l'artillerie
du 5e corps. Promu le 24 juillet 1880 général de division, il prenait, le 20
octobre suivant, le commandement de la 28e division d'infanterie. En 1881, le
nouveau Président du Conseil Gambetta, comprenant la supériorité de Miribel, le
plaçait de nouveau et malgré tous les obstacles à la tête de l'État-major
général. Le grand Ministère fut un ministère éphémère, et après doux mois de
fonctions le chef d'État-major général rentrait au Comité de l'Artillerie. Mais
l'opinion publique de l'Armée s'était affirmée; elle avait reconnu son chef,
elle ne pouvait plus s'en passer; et, tout en restant, en temps de paix, membre
du Comité de l'Artillerie, de Miribel devait conserver jusqu'à la fin de sa vie
le poste de Major-Général des Armées pour le jour de la guerre. Cette mission
redoutable, il ne l'avait pas désirée, c'était un sacrifice qu'il s'imposait
pour la patrie, car sa clairvoyance extrême lui montrait les immenses
responsabilités qui lui étaient imposées; il les regardait bien en face, mais il
en sentait tout le poids. Le 21 octobre 1888, de Miribel prenait le commandement
du 6e corps d'armée, à Cbâlons. Là, il se retrouvait sur son terrain, et ses
nouvelles fonctions allaient lui permettre de travailler avec plus de fruit à
l'œuvre qui absorbait toute son âme. Enfin, le 6 mai 1890, un décret du Chef de
l'État créait la situation de Chef d'État-major général de l'Armée, et confiait
ce poste éminent à celui que toute l'armée réclamait depuis si longtemps.
Le
général de Miribel a dit lui-même, avec une véritable éloquence, à l'Assemblée
des anciens élèves de l'École [polytechnique], le 23 février 1890, comment il
comprenait sa haute tâche. Depuis ce moment, tous les officiers qui ont eu
l'insigne honneur d'être ses collaborateurs et ses élèves ont pu admirer cet
indomptable travailleur, presque invisible aux siens et à ses amis, ne vivant
que pour son labeur, auscultant les forces de la France pour les relever,
sondant toutes ses faiblesses pour y porter le remède. Une seule pensée
absorbait toute son âme : ressusciter la gloire de sa patrie. C'est pour elle
qu'il a répandu son cœur, donné tous ses instants, sacrifié sa santé, et enfin
immolé sa vie.
Frappé à cheval, il est mort tout d'un coup, emporté par la
dévorante intensité de son travail; mais ce soldat et ce chrétien ne pouvait pas
être surpris, car son âme était celle d'un juste et il ne redoutait pas la
mort.