Le siège de Puebla
Mars - Mai 1863

Après le renvoi du général de Lorencez, consécutif à l'échec du premier siège de Puebla (mai 1862), le nouveau commandant en chef, le général Forey, réorganise son corps d'armée, composé de deux divisions (généraux Bazaine et Felix Douay) et d'un brigade de cavalerie, pour un total de 28.000 hommes.
Ces troupes quittent Orizaba le 22/02/1863 et arrivent devant Puebla dont l'investissement commence le 16 mars. Les forces mexicaines, commandées par Ortega (22.000 hommes) avaient puissamment renforcé la ville par des fortifications externes, completées par l'organisation de la ville en "cadres" (îlots de maisons que séparaient des rues à angles droits) tranformées en autant de citadelles. Les monuments et édifices religieux, en maçonnerie massive, étaient mis en état de défense et employés, soit comme réduits, soit comme magasins.
Le 23 mars, dans la nuit, la tranchée est ouverte.


Le premier objectif fixé est la prise du fort de Saint Xavier, formant une construction massive à trois étages au centre de laquelle se trouve une église et un pénitencier. La position est prise le 29 mars par le 1er bataillon de chasseurs et un bataillon du 2e régiment de zouaves.


L'assaut du pénitentier de San Xavier
JA Beaucé (1818-1875)

Rapport de l'assaut du Pénitencier du général Forey

"Au Cerro San Juan, le 2/4/1863.
Monsieur le Maréchal,
J'avais fixé le 23 mars pour enlever le fort de San Xavier, sur lequel se dirigeaient nos attaques, et j'ai l'honneur de faire connaitre à votre Excellence les détails de cette opération.
Le fort de San Xavier offre à l'ouest un front bastionné ; au nord, une grande courtine ; à l'est, une lunette couvrant l'entrée du côté de la ville ; et au sud, un front bastionné irrégulier. Ces ouvrages formant une enceinte continue, entourent une vaste construction qui comprend un pénitencier relié au couvent de San Xavier. L'ensemble de ce solide édifice a environ 180 mètres de long sur 60 de large. Il renferme trois cours intérieures et divers corps de bâtiments. Les abords étaient couverts de défenses accessoires et flanqués par de nombreuses pièces encore intactes. La défense était donc facile et la disposition intérieure des bâtiments permettaient de la pousser jusqu'aux dernières limites.
Il était indispensable de s'emparer de ce grand obstacle. Les travaux du génie nous en avaient rapprochée. Le feu de l'artillerie en avait ruiné les batteries. Il appartenait à l'infanterie de faire le reste.
Confiant dans la vigueur et l'énergie de mes troupes, je n'hésitai pas à ordonner l'assaut. Le 1er bataillon de chasseurs à pied et un bataillon du 2e zouaves formèrent les colonnes d'assaut. Un bataillon du 51e et un du 3e zouaves composèrent la réserve, indépendamment des deux bataillons de garde de tranchée. Je confiais la direction de cette importante opération au général Bazaine, qui, accompagné de son état-major, vint à une heure de l'après-midi prendre le commandement de la tranchée.

A 4 heures, toutes nos batteries dirigèrent le feu le plus vif sur le Pénitencier, de manière à compléter la ruine de ses défenses extérieures. A 5 heures, selon l'ordre donné, le feu s'arrêta. Le général Bazaine, placé dans la quatrième parallèle, donna le signal. Les cris répétés de " Vive l'Empereur ! " y répondirent et aussitôt la première colonne, sortant des tranchées, s'élança au pas de course sur le saillant de San Xavier, le couronna rapidement et pénétra dans l'ouvrage avec un élan irrésistible.
L'ennemi fut un instant surpris, mais au bout de quelques minutes, une grêle de balles partant des murs crénelés, des terrasses, des portes, des fenêtres, des clochers, couvrirent nos attaques. Les Mexicains démasquent en même temps des pièces cachées derrière les barricades ; ils y joignirent le feu d'une batterie de campagne placée en avant du fort de Carmen et celui de tous les forts voisins du point d'attaque, mais ce déluge de mitraille n'arrêta pas l'élan de nos soldats.
La seconde colonne suivit de près la première, et bientôt elles pénétrèrent dans le Pénitencier. La garnison formée d'environ 700 hommes, avec plusieurs pièces de campagne, essaya de résister. Pour la première fois les Mexicains sentaient la pointe de nos baïonnettes ; ils cédèrent à l'impétuosité de cette attaque. Pourchassés sans relâche d'étages en étages, de chambres en chambre, quelques-uns parvinrent à s'échapper, beaucoup succombèrent et le reste fut pris.
Dans les différentes parties du bâtiment, il y avait de la poudre, des caisses de cartouches et des chaînes de bombes enterrées qui devaient éclater au moyen de ficelles dissimulées par de la paille. Grace à l'énergie et aux dispositions prises par le capitaine du génie Barrillon, il n'en résulta aucun accident.
L'ennemi voyant le Pénitencier en notre possession, essaya de le reprendre. Une réserve de 2.000 Mexicains s'avança sur la face orientale ; mais les chasseurs et les zouaves, installés au premier étage du bâtiment, accueillirent cette colonne par un feu plongeant si nourri, qu'elle rétrograda promptement derrière les barricades de la ville. L'ennemi continua à diriger sur le fort une fusillade des plus vives qui ne s'arrêta qu'à 7h1/2.

Les pertes de l'ennemi sont graves, car l'intérieur du fort était rempli de cadavres. Nous avons pris dans l'ouvrage trois obusiers, une pièce de campagne, des chariots chargés de projectiles, et les deux fanions du 20e bataillon de ligne mexicain. On a ramené près de 200 prisonniers, dont 10 officiers, parmi lesquels se trouvent un colonel du génie et un colonel d'infanterie.
Officiers et soldats des diverses armes méritent les plus grands éloges pour leur entrain et leur discipline dans le combat. Je citerai parmi eux d'une manière toute spéciale :

Le général de division Bazaine, qui a conduit ses troupes à l'assaut avec une grande intrépidité ; Le général d'artillerie de Laumière, qui a été blessé gravement (il mourut le lendemain) ; Le colonel Garnier, du 51e, commandant les tranchées, qui a été blessé ; Le colonel Viala, commandant supérieur du génie, qui a coopéré au succès par l'excellent direction donnés aux travaux ; Le commandant Billard, major de tranchée ; Le capitaine d'état-major Davenet, aide major de tranchée ; Le capitaine de Galliffet, officier d'ordonnance de l'Empereur, aide major de tranchée, qui s'est élancé sur le saillant de l'ouvrage, un fanion national à la main.
Dans l'artillerie : De Miribel, capitaine attaché à l'état-major de l'artillerie, blessé légèrement à la tête, a montré beaucoup d'énergie et d'intelligence dans le parti qu'il a su tirer des pièces prises à l'ennemi ; Guany et Babaut, maréchaux des logis ; Baudin, canonnier.

Colonel Garnier
51e régiment
Commandant les tranchées
Blessé par un biscaïen qui lui perce le bras droit et le pénètre par l'aisselle jusqu'à l'épine dorsale.

Commandant Billard
Major des tranchées
Cité pour son action.

Capitaine de Miribel
Attaché à l'état major de l'artillerie
Commande le détachement chargé d'enclouer les bouches à feu prises à l'ennemi
Blessé à la tête et fait officier de la Légion d'Honneur
Ici général sous la République.

Dans le génie : Le capitaine Barrillon, commandant le génie, qui arrivé sur le saillant avec la 1ere colonne, a dirigé les zouaves et les chasseurs à pied sur les terrasses ; Ekendorff, capitaine ; Mélard, lieutenant : Cabarel, sergent, contusionné ; Le Bastard, sapeur gravement blessé ; Cazes, sapeur blessé ; Grimbichler, Sapeur, blessé, Gros ; sapeur.

Au 1er bataillon de chasseurs à pied : De Courcy, chef de bataillon, à la tête du 1er échelon, l'a dirigé avec intelligence et une brillante bravoure ; Morhain, Horcat, Guihamin, capitaines ; Suberville, lieutenant ; Rouzeaud et Gennardi, sous-lieutenants ; Béraud, adjudant sous-officier ; Bonneau, caporal clairon ; Florentin, sergent a planté le fanion du bataillon en haut du Pénitencier, sous un feu meurtrier ; Vincend, chasseur ; Estoup, caporal ; Clément, sergent major ; Klinger, sergent.

Sous Lieutenant Rouzeaud
1er bataillon de chasseurs
"S'est distingué par sa bravoure"
Fait chevalier de la Légion d'Honneur

Sous Lieutenant Gennardi
1e bataillon de chasseurs
"A su communiquer aux soldats son entrain admirable"
Chevalier de la Légion d'Honneur
Blessé le 28 avril.

Capitaine Horcat
1e bataillon de chasseurs
Cité pour sa belle conduite lors de la prise du pénitencier
d'une intrépidité et d'un sang froid admirables

Au 2e bataillon du 2e régiment de zouaves : Gauffinet, sergent ; Gautrelet, chef de bataillon, commandant le 2e échelon, a donné l'exemple de l'intrépidité et pendant le combat a dirigé son bataillon avec une grande intelligence militaire ; Escourrou, capitaine, quoique blessé au bras a continué à marcher à la tête de sa compagnie et y a été tué au milieu des groupes ennemis ; Coste, capitaine ; Caze, sous-lieutenant ; Fontanes, sergent, quoique blessé au pied a continué à combattre avec sa compagnie et a été blessé une second fois ; Durant, caporal, arrivé un des premiers dans le redan, a placé et pointé une pièce d'artillerie abandonnée par l'ennemi et sur laquelle il a été blessé gravement ; Tessieu, caporal, s'est emparé d'un fanion de bataillon ennemi ; Chirion, zouave, blessé, s'est également emparé d'un fanion de bataillon après avoir tué deux ennemis ; Louët, zouave, a montré autant de générosité que de bravoure en faisant prisonnier un officier supérieur ennemi qui l'avait frappé d'un coup de sabre à la tête ; a reçu plus tard une second blessure.

Au 1er bataillon du 3e Zouaves : Parguez, capitaine ; Baldy, sous-lieutenant ; Gasc et Loches, sergents majors, ce dernier quoique blessé deux fois, a continué à donner l'exemple avec la plus grande intrépidité ; Herbaut, Lartigues et Pô, zouaves blessés au premier rang.

Le général de division commandant en chef Forey"

Extrait de l'historique du 2e régiment de zouaves :

Toute la journée du 29 mars la canonnade contre le fort de Saint-Xavier ne cesse pas une minute. L'assaut du fort a été fixé pour cinq heures du soir et le général en chef a décidé que l'honneur de cette périlleuse attaque sera réservé aux deux bataillons qui, le 5 mai précédent, ont échoué dans leur entreprise contre le fort de Guadalupe : 1er bataillon de chasseurs à pied et le 2e bataillon du 2e Zouaves.
Le général Bazaine doit diriger l'opération. Dès quatre heures, des gradins de franchissement sont établis dans la quatrième parallèle et des échelles sont préparées. Derrière la parallèle, les deux bataillons désignés sont rassemblés ; quatre autres sont prêts à soutenir l'assaut. Dans les deux bataillons qui forment la colonne d'attaque, trois groupes sont formés, composés de deux compagnies de chasseurs à pied et de deux compagnies de zouaves. Le premier groupe comprend trois compagnies de zouaves.
Pendant une heure, de quatre à cinq, le feu de notre artillerie redouble ; tous les boulets sont dirigés sur le deuxième étage du fort. Enfin la brèche est jugée praticable. L'artillerie cesse tout à coup de tonnerre ; un silence profond succède à la furieuse canonnade. Quelque chose de grand se prépare.

Les zouaves, impatients, leur fusil en main, ont les yeux fixés sur le commandant Gautrelet qui doit leur donner le signal. Enfin, à cinq heures le signal est donné. Le premier groupe d'attaque fait irruption hors de la parallèle et se précipite vers le fort. Les défenses accessoires accumulées par l'ennemi sont rompues et franchies. En vain, la fusillade crépite et la canonnade fait rage. Quelques minutes suffisent aux zouaves pour arriver jusqu'aux fossés. Au moment où ils escaladent le talus, les camarades du deuxième groupe, qui a suivi le premier, sautent à leur tour dans le fossé.
De haut en bas, les Mexicains déchargent leurs fusils, mais les zouaves ne leur laissent pas le temps de tirer deux fois. Ils passent à travers les brèches et pénètrent dans le fort. Tout d'abord, ils ne rencontrent pas la résistance à laquelle ils s'attendaient ; mais, au moment où elle débouche dans la deuxième cour intérieure, la tête de colonne est reçue par une fusillade intense qui part des corridors et des fenêtres du rez-de-chaussée.
Sans répondre au feu de l'ennemi, les zouaves et les chasseurs à pied, entrainés par leurs officiers, traversent la cour balayée de feux et se précipitent dans l'intérieur du bâtiment. L'élan est tel qu'ils arrivent sur les Mexicains avant que ceux-ci aient le temps de fuir. Plus de 100 d'entre eux sont faits prisonniers. Les autres, voyant apparaître presque subitement dans les étages supérieurs les zouaves que rien n'a pu arrêter, se débandent et s'enfuient vers la ville, tandis que les assaillants les poursuivent, la baïonnette dans le dos.
Pendant que les deux premiers groupes envahissent ainsi le fort, le troisième, commandé par le capitaine Costes, s'est dirigé sur la gauche du fort dans lequel il pénètre à son tour ; puis, du premier étage, il ouvre sur l'ennemi un feu des plus vifs. Un gros de Mexicains qui s'est avancé de ce côté pour tourner la position des zouaves, surpris par ce feu inattendu, bat en retraite précipitamment.

Tout cet assaut a duré une demi-heure à peine. Le fort est entre nos mains. Zouaves et chasseurs se répandent maintenant dans les étages et prennent position derrière les créneaux d'où l'ennemi tirait tout à l'heure sur eux. La fumée épaisse qui, un moment, a tout obscurci se dissipe et le calme se rétablit peu à peu.
Tandis que le drapeau tricolore, hissé sur le sommet du fort aux acclamations de toute l'armée, annonce la victoire à laquelle le 2e bataillon du régiment vient de prendre la plus grande part, la nuit commence à tomber. Le succès ne peut pas dès lors être poursuivi plus avant. En cela l'heure du combat n'avait pas été très bien choisie. Quoi qu'il en soit, les zouaves ont enfin pris leur revanche de l'échec du Guadalupe mais cette revanche coûte cher au régiment qui, pour un seul bataillon engagé pendant une demi-heure, a 6 officiers et 90 zouaves hors de combat.
Parmi ceux qui se sont faits particulièrement remarquer, il faut citer : Le commandant Gautrelet, qui a donné l'exemple de l'intrépidité pendant le combat et dirigé son bataillon avec une grande intelligence militaire. Le capitaine Escourrou, qui, déjà blessé, est allé se faire tuer au milieu des groupes ennemis ; le capitaine Costes, qui a dirigé avec une froide intrépidité l'attaque et la défense; le sous-lieutenant Caze; le sergent Fontaine qui, blessé, a continué à combattre jusqu'à ce qu'une autre blessure l'ait fait tomber; le sergent Gauffinet. Le sergent Dousseau, chevalier de la Légion d'honneur, libéré depuis l'avant-veille et devant partir le même jour pour s'embarquer à la Vera-Cruz, obtient la faveur de marcher avec sa compagnie; après l'affaire, il rentre au camp, ayant sa veste et son gilet couverts du sang d'un officier mexicain qu'il avait traversé d'un coup de baïonnette; le caporal Durand, arrivé des premiers dans une batterie, qu'il a fait retourner par ses zouaves, et où il s'est employé comme servant; le zouave Louët, qui a montré autant de générosité que de courage en prenant vivant un colonel mexicain qui venait de lui porter un coup de sabre à la tête; le caporal Tessière et le zouave Chirion, qui ont pris chacun un fanion appartenant au 20e de ligne ennemi. Ces deux trophées sont aujourd'hui aux Invalides. Maintenant, les derniers coups de feu se sont éteints dans l'intérieur du fort ; les zouaves, victorieux, recueillent leurs blessés et leurs morts. L'obscurité est complètement venue. Les Mexicains, retirés dans la ville, bombardent le bâtiment où se sont retranchés les zouaves. De minute en minute, un obus, comme une fusée, sillonne en sifflant la nuit profonde et vient éclater près d'eux ; mais les zouaves tiennent bon et le fort Saint-Xavier est bien définitivement conquis.
Voici la liste des officiers tués et blessés dans cet assaut. Tués : MM. Escourrou, capitaine ; Kermabon, lieutenant. Blessés : MM. Le Gô, Labrune, capitaines ; Caze, Laurent, sous-lieutenants.

Capitaine Labrune
2e zouaves
Blessé d'un coup de feu à la jambe avec fracture
Fait chevalier de la Légion d'Honneur

Capitaine Costes
2e régiment de zouaves
"d'une intrépidité et d'un sang froid admirables"

Capitaine Fournes
1e régiment de zouaves
reçoit une "forte contusion à la jambe droite par un éclat d'obus
en faisant de nuit une reconnaissance dans
les fossés du fort le 27 mars"

La prise du fort de Saint Xavier ne fait pas tomber la ville qui va continuer une résistance héroïque, cadre par cadre.


Le siège de la ville se caractérise par de nombreux combats au corps à corps pour la possession de ces petites places fortes.


Plan de la ville de Puebla
Historique du 1er régiment de zouaves
Zoomer ici

En particulier, le 6 avril 1863, le cadre 34 est la scène d'une lutte épique :

A 5 heures du soir, une avant garde de 30 zouaves du 1er régiment, commandée par le lieutenant Galland pénètre vivement par une brèche insuffisante ; une section le suit avec le même entrain : un feu épouvantable de mitraille et de mousqueterie le remplit aussitôt la rue ; plusieurs hommes sont tués et les blessés se rejetant en arrière, paralysent l’élan de la colonne. Le commandant Carteret-Trécourt , saisissant un zouave par le bras, l’entraîne avec lui au milieu de l’espace qui sépare les deux cadres et que la mitraille balaye incessamment. Le capitaine Michelon, le lieutenant Avèque s’élancent sur ses pas : le capitaine Michelon est tué, le commandant Carteret, le capitaine Guillemain, le lieutenant Avèque sont blessés : 7 sous officiers, caporaux ou zouaves sont tués ; 30 hommes sont mis hors de combat. Le feu de l’ennemi se concentre alors sur San Marcos, empêche la colonne de déboucher et la force à renoncer à l’attaque.

Commandant Carteret Trecourt
1e régiment de zouaves
Blessé d'un éclat d'obus à la jambe
Cité à l'ordre du corps expéditionnaire

Le lieutenant Galland se trouvait donc isolé dans le cadre 34 et pris comme dans une souricière. Il raconte :

« En arrivant en haut de la brèche je me trouvai en face d’une cour dont trois côtés étaient fermés par des chambres gardées et crénelées ; les chambres du premier étage étaient également occupées. Quelques Mexicains, encore dans la cour, furent repoussés à coups de baïonnettes et se réfugièrent dans la chambre à notre gauche où nous les poursuivîmes. Là nous en fîmes un petit massacre. Cette chambre communiquait intérieurement avec celle qui, faisant face du milieu, se trouvait vis à vis de la brèche. Nous la fîmes également évacuer et je me trouvai ainsi maître, avec une poignée d’hommes, de deux faces de cette cour ; restait la troisième, celle que nous avions à notre droite et qui était malheureusement très fortement occupée, ayant un fossé en avant et sans communication intérieure avec les chambres que nous occupions. Ce fut notre perte sans découvert. Une troisième sortie devenait inutile ; je résolus d’organiser mes hommes pour défendre ce que nous avions pris. Car, pendant tout ce temps là, au milieu du brouhaha, des cris des blessés, de la fusillade incroyable qui nous entourait, j’avais bien vu que personne ne nous suivait, que, seuls, les miens avaient pu passer, et que le succès, relativement beau que je venais d’avoir était en pure perte si je n’étais pas secondé.

Le lieutenant Galland
Photo Ken (Paris)
Galland à la prise de Puebla

Je voyais clairement la situation : ou la mort bête et inutile du soldat pris dans une souricière sans que son courage puisse lui servir à rien, ou la captivité après la reddition. Les conséquences me vinrent très vite à l’esprit et je m’arrêtai à cette détermination : tenir le plus longtemps possible pour permettre de nous dégager, si à un moment que je ne prévoyais pas, les nôtres pouvaient faire une sortie ; profiter de tous les incidents pour sortir de notre prison, et, au dernier moment, si nous devions en venir à cette dure extrémité, et quand il serait bien reconnu que nous ne pourrions plus faire autrement, capituler avec les conditions les plus honorables que nous pourrions obtenir.
Le nuit bien noire était venue. J’ordonnai de ne tirer qu’à coup sûr, et je fis mettre baïonnette au canon à quelques hommes (et je comptai beaucoup sur cette chance là), si les Mexicains étaient venus nous prendre de force dans nos chambres, devaient sortir les premier en les poursuivant dans la cour ; tous auraient suivi et, passant de nouveau la brèche en sens inverse, nous aurions pu rentrer dans la maison d’où nous étions sortis.

Les Mexicains continuaient à nous envoyer des balles en quantité, et nous fermaient littéralement les portes à coup de fusil. Du fossé qui était dans la cour et bien à l’abri, il nous envoyaient des grenades à main, dont les éclats étaient bien gênants ; un caporal et un homme furent tués ainsi, et le feu s’étant mis dans les vêtements du caporal, je le fis enterrer. De plus, pour s’éclairer et pour voir combien de nous restaient debout et comment nous étions disposés, ils lancèrent des feux de bengale. Un de ces feux surtout, un feu vert, me donna un spectacle dont je n’oublierai jamais la vigueur et la sauvage beauté. Ce feu éclairant seul les belles têtes des Zouaves à longues barbes, prêts à s’élancer, la baïonnette croisée ; les reflets verdâtres sur les canons, les ombres vivement portées, la colère peint sur tous ces visages, par terre les morts et les blessés, tout cela ne fut qu’une vision dont je me surpris à admirer l’étrange grandeur.

Vers 10 heures rien n’était changé, sauf que le feu des mexicains avait un peu diminué, et que du côté des nôtres, il avait cessé complètement. Je ménageais mes cartouches et je faisais chercher un passage intérieur, ne pouvant me résoudre à attendre les bras croisés, le bon plaisir les libéraux. Vers 10h et quart, un officier mexicain s’aventura dans la cour en parlant. Personne ne tira, sauf deux coups partis de la chambre où je n’étais pas, et il fut manqué. Il s’avança et me dit en parfait castillan : « Abajo los armas, chingados ! » Je n’étais pas très ferré alors sur la langue du Cid, mais comme les plus laides choses sont celles que l’on apprend le plus facilement, et que je passais ma vie depuis huit mois à escorter des convois et à entendre parler des arrieros, il n’y a rien d’étonnant que j’aie compris l’insulte et trouvé ce monsieur peu parlementaire. Je sortis donc de ma tanière et après lui avoir dit « Chingado tu mismo ! » je lui logeai deux balles de mon petit revolver en pleine poitrine ; il fut foudroyé et je rentrai chez moi fort bien escorté, mais touché seulement par une balle à la hanche droite.
Il y eut alors une recrudescence de coups de fusil, auxquels nous ripostâmes de notre mieux, puis tout rentra dans un calme relatif qui me permit de continuer mes recherches de passage.

Pendant ce temps un officier mexicain qui parlait très bien le français conseilla aux hommes de se rendre : dix cédèrent, se sentant abandonnés sans cartouches et sans vivres, exténués par une défense faite dans des conditions impossibles. Je me trouvai donc réduit à six hommes (Segent major Merlier, Sergent Labrunie, Caporaux Combotte et Cheviet, Zouaves Jalley et Duvette) et mois septième : trois étaient blessés, une capitulation devenait de plus en plus certaine, mais je voulais en retarder le moment le plus longtemps possible. Instruits probablement par les transfuges, les Mexicains recommencèrent le feu et nos cartouche diminuaient de plus en plus ; on perçait le plafond sur nos têtes et j’ai su plus tard que leur intention était de nous écraser dessous ; en attendant ils nous canardaient d’en bas et d’en haut. La situation se tendait de plus en plus, il y avait six heures que nous tenions, c’était humainement tous ce qu’on pouvait exiger de nous. Je voyais du reste que deux pièces de montagne allaient faire brèche et nous ensevelir dans notre réduit. »

Le lieutenant Galland prévint ses hommes qu’il allait parlementer, le sergent Major Merlier, qui se trouvait là avec le fanion, en brisa la hampe et mis la fanion dans sa grande culotte.

« Ces tristes dispositions prises je m’avançai au milieu de la cour, où je fus assez mal reçu. On me conduisit dans une chambre au dessus de celle que nous occupions et je trouvai le général La Llave et quelques officiers. Je m’avançai, mon sabre à la main et je lui fis ce discours qui est bien plutôt celui d’un fou que celui d’un homme sensé : « Je suis dans la chambre au dessous de vous, j’ai six hommes, trois sont blessés et je n’ai plus que quelques cartouches ; si vous m’accordez que mes six hommes et moi nous conserverons nos armes, je vais aller chercher mes cinq hommes et nous serons vos prisonniers. Si vous me refusez ce que je vous demande, j’irai le rejoindre comme c’est mon droit de parlementaire, et vous viendrez nous prendre. »… et j’avais l’air sans doute très convaincu de ce que je disais car le général La Llave m’embrassa sur les deux joues et m’accorda tout ce que je demandais. »

les sept prisonniers furent conduits à l’archevêché, près d’Ortéga, le général en chef mexicain, qui les reçut fort bien et les retint pendant trente jours.


 

Prise des cadres 29 et 31 - 19/4/1863

On continue, cependant, à progresser lentement dans les cadres, et le 19 avril, on attaque le cadre n°29. Le colonel Mangin, de tranchée, lance à l'assaut de deux brèches reconnues praticables, le 18e bataillon de chasseurs à pied formé en deux petites colonnes, 6e et 2e, 1ere et 3e compagnies, soutenues par les feux d'écharpe des 4e et 5e compagnies. A 4 h. 1/2, nos deux colonnes d'assaut, précédées d'une douzaine de volontaires, franchissent les brèches sous une pluie de fer et se heurtent à des retranchements intérieurs précédés de fossés. Une vive fusillade, partie du haut des terrasses et des fenêtres, se croise sur nos chasseurs ; le cadre est défendu par plus de 1,400 hommes.

Colonel Mangin
3e régiment de zouaves

Le colonel lance alors le 1er bataillon du 3e zouaves en renfort. La 5e compagnie, commandée par le capitaine Rigault pénètre dans le cadre 29 par la brèche de droite, enlève avec un irrésistible entrain le parapet qui couvrait la première cour, et permet aux zouaves et aux chasseurs à pied d'y renter.
Rien n'arrête l'élan des nôtres : ils escaladent les parapets, et, continuant leur course à la suite de l'ennemi terrifié, s'emparent du cadre 31, qui fait suite au cadre 29 et n'en est séparé que par un passage souterrain.
Nos troupes avaient infligé des pertes cruelles à l'ennemi : 100 morts et 400 blessés ou prisonniers; il avaient pris 3 canons et une grande quantité d'armes et de munitions. Malgré la rapidité et l'ensemble de ces deux attaques, les pertes du 18* bataillon s'élevèrent à 8 tués et 41 blessés, le 1er bataillon du 3e Zouaves a 2 tués et 26 blessés, sur l'ensemble des 10 tués et 66 blessés que nous coûta cette affaire.
 

Capitaine Michelet
3e régiment du génie
Commande la section du génie qui se distingue le 19 avril.

Capitaine de Galliffet
Officier d'ordonnance de l'Empereur, détaché au Mexique
déjà décoré à la prise de San xavier
Blessé d'un éclat d'obus au ventre.
Rappatrié, il ramène les drapeau pris à l'ennemi à l'Empereur.

Capitaine Beraud de Courville
2e régiment de zouaves
Distingué lors de la journée du 19/4/1863
Il est tué en janvier 1865.

Lieutenant de Thury
Commande les batteries 11 et 16 qui servent d'appui à l'assaut
Cité à l'ordre de l'armée.

Le général en chef, dans son ordre du jour du 23 avril, rendait hommage en ces termes à l'éclatante valeur déployée par les troupes :

Le cadre 29 était une véritable forteresse que le 18e bataillon de chasseurs et le 1er bataillon du 3e zouaves, auxquels le génie et l'artillerie avaient habilement et energiquement préparé ls voies, ont attaqué avec une résolution couronnée de succès le plus complet et acheté au prix de peu de sang.
Pour être juste, le général en chef voudrait citer tous ceux qui ont pris part à cette attaque ; mais cela n'est pas possible et il se borne à mettre à l'ordre ceux qui se sont plus particulièrement distingués. "

Au 18e bataillon de chasseurs à pied : 10 officiers, dont le capitaine Bréart, commandant le bataillon, et 40 sous-officiers et chasseurs. Une croix d'officier de la Légion d'honneur est donnée au capitaine Raynal ; trois croix de chevalier sont accordées au lieutenant Motas, au médecin aide-major Chabert, et au sergent-major Descombes; 14 sous-officiers et chasseurs sont médaillés. Le commandant Brincourt, du 3e zouaves, prenait, le 20 avril, le commandement de ce brave bataillon.

Capitaine Bréart
Commande le 18e bataillon de chasseurs

Capitaine Raynal
déjà décoré et blessé en Crimée
Fait officier de la Légion d'honneur
"a entrainé sa compagnie à l'assaut avec la plus grande vigueur"

Lieutenant Motas
"A rempli avec autant d'intelligence que d'intrépidité
les fonctions d'adjudant major pendant l'attaque"

Sous Lieutenant de Bermond de Vaulx
Cité à l'ordre du jour
tué en 1870

Au 3e zouaves : M Mangin, colonel qui commandait les colonnes d'attaque ; M de Briche, chef de bataillon, MM Parquez, Japy, Mariani, Rigault capitaines, Couturier, Légué, lieutenants ; Henri et Faval, sous lieutenants ; Beaudoin médecin major ; 21 sous officiers et zouaves.

Frédéric Benoit Japy

Saint Cyrien, entré au 3e régiment de Zouaves en 1850 avec lequel il a fait campagne en Algerie et en Italie.
Il va s'illustrer au Mexique d'abord à Puébla où il est nommé officier de la Légion d'Honneur pour son action le 19/04/1863 ("s'est fait remarquer tout spécialement par son élan, sa vigueur et son intelligence"), puis au combat de Majoma en septembre 1864.

Chollula, 22 avril 1863.
Trois jours et trois nuits de tranchée, depuis le 19 au matin jusqu'au 22 à midi ; de plus un combat brillant dans lequel nous avons enlevé trois îlots de maisons, tué deux cents Mexicains, fait prisonniers deux cents autres, et pris cinq cents carabines, deux mortiers et un obusier. Voilà ce que nous avons fait dans la journée du 19, mais le lendemain et le surlendemain, nous avons passé jour et nuit à recevoir toute espèce de projectiles, très inoffensifs, puisqu'ils ne nous ont tué personne, très inoffensifs, dis-je, mais très assourdissants.
Après ces trois jours de fatigue nous espérions nous reposer. A peine arrivés au camp, à peine avions-nous eu le temps de déjeûner, qu'on sonne la marche du régiment et nous voilà partis pour Chollula, d'où je t'écris. Demain matin à cinq heures, nous partons avec le bataillon, sans sacs, pour une pointe quelconque que nous ignorons.
("Lettres d'un officier à sa mère" - Gl Japy)

 

 

Charles Rigault

Avant de se distinguer lors de la prise du cadre 29, Rigault s'était distingué le 2 avril lors de la prise du cadre de San Marco : "Le commandant Rigault ne savait trop comment, vu l'extrême obscurité, diriger son bataillon dans les épaisses ténèbres. Il dit à son ordonnance d'allumer la petite lanterne dont celui-ci était muni. Le soldat se récrie, objectant que la lumière servira de point de mire à l'ennemi. «Soit », dit l'intrépide Rigault, et il fait briller lui-même la petite flamme, qui allume le fanal portatif. En même temps, il fixe le crochet de la lanterne à l'un des boutons de sa tunique, sur sa poitrine, et continue ainsi à combattre. Cependant les balles le respectèrent, et le glorieux surnom qu'on sait lui resta. Il était destiné à être frappé dans un combat de nuit"(Francais et Allemands - de Lonlay)

Rigault est en effet tué le 2/10/1870 au point du jour à la batille de Ladonpchamp.

 


 

L'attaque manquée du l'eglise de Santa Inez - 25/4/1863

Extrait de l'ouvrage "L'expédition du Mexique" du Général Niox"

L'attaque commença le 25 avril au matin. L'explosion des mines renversa une partie du mur d'enceinte et des constructions extérieures du couvent; les batteries en achevèrent la destruction, mais on put alors se rendre compte des difficultés inouïes que présentait l'attaque. En arrière du mur renversé, régnait une forte grille en fer, que les boulets ne pouvaient abattre; quatre retranchements successivement étagés, dont les deux derniers avec des escarpes en pierre, avaient été formés au moyen des décombres des constructions voisines. Les abords étaient garnis d'abatis et de filets en corde de cuir, reliés entre eux par des piquets; derrière le dernier parapet s'élevaient les bâtiments du couvent Santa-Inès, avec leurs murs percés de créneaux, des tireurs à toutes les fenêtres et sur les terrasses. Une aile de ce bâtiment sur laquelle était placée une pièce d'artillerie, flanquait les retranchements.
A six heures et demie, les canons de la batterie de brèche entrent en action, cherchant à bouleverser les retranchements, à briser la grille, à détruire les maçonneries. Le feu dure ainsi pendant trois heures, quoique les servants des pièces aient beaucoup à souffrir de la proximité des tirailleurs ennemis. A neuf heures et demie, le général de Castagny reçoit l'ordre de tenter l'assaut.

Le signal est donné; les huit pièces de la batterie de brèche font une salve à mitraille et les colonnes s'élancent.
Celle de droite, composée de quatre compagnies du 3e bataillon du 1er zouaves, est commandée par le chef de bataillon Melot; celle de gauche, composée des quatre autres compagnies du même bataillon, est conduite par le capitaine Devaux. L'ennemi avait ralenti son feu; mais à peine les colonnes commencent-elles à déboucher, que les murs, les fenêtres, les terrasses se couvrent de tirailleurs. Plus de 2,000 Mexicains concentrent leur tir sur l'espace étroit où se pressent les assaillants, et dont le parcours est rendu très difficile par les décombres des murs renversés et par les obstacles qui s'y trouvent accumulés. Les zouaves s'avancent sous une grêle de balles; la colonne de droite atteint la grille, celle de gauche la dépasse et arrive jusqu'aux constructions du couvent; en ce moment, le feu de l'ennemi redouble. Les colonnes s'arrêtent écrasées; l'attaque ne peut être continuée sans de grands et inutiles sacrifices; l'ordre est donné de battre en retraite, mais bien peu de ces braves soldats rentrent dans les lignes.
Ce terrible assaut avait coûté dans la colonne de gauche, sur dix officiers, neuf tués ou disparus; dans celle de droite, un officier tué, deux disparus, cinq blessés; 27 hommes étaient tués, 127 blessés, 176 avaient disparu. On sut plus tard que, sur ce chiffre, 130 hommes, dont 7 officiers, étaient prisonniers. L'ennemi admira leur courage et les traita avec égards. Ces hommes avaient combattu comme des lions, dit le rapport du général Ortega.

  

Henri Loizillon

Officier d'état major, Henri Loizillon a servi en Crimée où il a été blessé lors de la prise de Sébastopol le 8/9/1855.
Attaché à l'état major du général Douay durant la campagne du Mexique, il a laissé une correspondance fournie de sa campagne, publiée en 1890. Il participe notamment au siège de Puébla et il y est cité pour sa conduite à l'attaque du cadre de Santa Ines ("Toujours prêt à marcher au devant du danger") et y reçoit la croix d'officier de la Légion d'Honneur.

Lettre du 30/4/1863
Pour l'assaut, il y avait deux colonnes devant sortir à chaque coin du cadre 30. J'étais avec la colonne de droite. Pour déboucher, il nous fallait ouvrir deux portes soutenues par des sacs à terre. On retire les sacs avec des crochets pendant que les portes étaient déjà traversées par les balles. Enfin les portes s'ouvrent et on s'élance, mais pour joncher le sol de la porte à droite de la grille car les Mexicains voyant nos préparatifs se remettent à leurs créneaux derrière leurs murs épais et nous envoient un grêle de balles.
Le premier élan n'ayant pas réussi, il était certain que le succès nous échappait. Cependant l'amour propre et le désir de vaincre font tenter de nouveaux efforts ; efforts inutiles qui ne font qu'augmenter nos pertes.
Le général Douay se décide à arrêter l'attaque et donne l'ordre à l'artillerie de recommencer son feu. A ce moment j'arrive près de lui et lui annonce que nous avons plus de 200 hommes dans les abords de Santa Ines que nous nous exposons à tuer. Vous peindre la figure de ce brave homme à cette nouvelle est chose impossible : savoir ses soldats au pouvoir de l'ennemi et les laisser ! D'un autre côté recommencer l'attaque sans chance de réussir ! Après s'être mordu les lèvres jusqu'au sang, il me dit : " Donnez l'ordre à l'artillerie de ne pas tirer. ". Il a été beau dans ce revers.
L'attaque arrêtée, l'ennemi a fait feu de toute son artillerie sur notre pauvre cadre 30 qui a été percé à jour.
("Lettres sur l'expédition du Mexique" - Capitaine Loizillon)

 

Rapport du commandant Melot, commandant le bataillon du 1er Zouaves

"Je me plais à citer M. le capitaine adjudant-major Renaud, qui a fait preuve dans plusieurs reprises différentes, d'une bravoure et d'un sang-froid que vous avez été à même de constater avec notre général de division. Il a coopéré aux trois tentatives de sortie par la brèche, dirigeant au premier rang les braves auxquels il avait fait appel pour les deux dernières sorties. Aussitôt que l'attaque fut abandonnée, M. le capitaine Renaud s'est bravement exposé pour reprendre trois cadavres de zouaves, qui se trouvaient à portée au-delà de la brèche, et retirer à lui M. le sous-lieutenant Herbelin, blessé. L'activité et l'intelligence de cet officier méritent les plus grands éloges.
M. le médecin-major Arondel a rempli pendant cette période sa mission éclairée et intelligente, avec une activité, une sollicitude et un dévouement soutenus, prodiguant ses soins aux blessés de n'importe quel corps, restant exposé près de la brèche, sans souci de sa conservation; durant trois jours et trois nuits consécutives, il n'a cessé de se montrer dévoué au devoir périlleux de sa mission.
M. le sous-lieutenant Herbelin pouvait, dans l'ordre où se trouvait le bataillon, ne pas être exposé aux dangers de l'attaque. A l'appel des plus braves, fait par le capitaine Renaud, il s'est précipité hors la brèche, avec une intrépidité dont il a déjà donné des preuves en Italie où il a été blessé.
M. le sous-lieutenant Sonnois n'était pas engagé; il aurait pu, comme M. Herbelin, rester inactif; il est ac couru à l'appel des braves près M. le capitaine Renaud, et a reçu une blessure dans la poitrine.
En résumé, les pertes éprouvées par le 3e bataillon pendant l'affaire se décomposent ainsi qu'il suit : Six officiers tués capitaines Devaux, de Marcilly, lieutenants De Bornschlegel, Estennevin, de la Haye Saint Hillaire, Heurteux. ; Huit officiers blessés : commandant Melot; capitaine adjudant-major Renaud; Sous-lieutenants Demilly, Herbelin, Sonnois; plus trois officiers prisonniers : capitaines Lalouette; Sous-lieutenants Duchesne, Mathieu ; Trois officiers prisonniers, non blessés: capitaines Avril, Blot; Sous-lieutenant Saleta. Deux cent trente-six sous-officiers, caporaux et zouaves tués, blessés ou prisonniers

La conduite héroïque des officiers et des soldats du 3e bataillon du 1er régiment de zouaves fut mise à l'ordre de l'armée en ces termes:
" Dans la matinée du 25 avril, le cadre de Santa Inez a été attaqué avec une extrême vigueur par un bataillon du ler régiment de zouaves. Malheureusement, des obstacles imprévus ont fait échouer cette entreprise. Le général en chef n'en doit pas moins signaler au corps expéditionnaire les militaires de tous grades qui se sont fait remarquer par leur bravoure en cette circonstance, et il est heureux surtout de rendre la plus éclatante justice aux officiers du 1er zouaves qui ont montré si vaillamment à leurs soldats le chemin de l'honneur. Un grand nombre d'entre eux ont payé leur bravoure chevaleresque de leur vie ou de leur liberté.  

Capitaine Avril
1e régiment de zouaves
Fait prisonnier
nommé officier de la Légion d'honneur

Capitaine de la Tour du Pin Chambly
Officier d'ordonnance du général Douay
Blessé d'une balle qui lui traverse la cuisse

Capitaine Renaud
1er régiment de zouaves
Blessé d'une balle à l'oeil et de fortes contusions aux jambes
Cité "pour sa bravoure et son courage hors ligne"
Général de division en 1889

 

Sous Lieutenant Sonnois
Blessé d'une balle à la poitrine
Cité à l'ordre du corps expéditionnaire

Capitaine Billot
Etat major
Cité à l'ordre du corps expéditionnaire

Capitaine Clairin
Commande la batterie de l'artillerie de la Garde qui appuie l'assaut
Nommé officier de la Légion d'honneur le 14/8/1863
"A construit plusieurs batteries sous le feu de la place de Puebla.
Sait obtenir de grands efforts de ses soldats dans les moments difficiles"

 


Le 17 mai, les troupes mexicaines doivent capituler, manquant de vivres et de munitions. 14.000 hommes sont faits prisonniers. La route de Mexico est désormais ouverte.

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